Présent lors de la journée de rencontres autour de l’anniversaire du dispositif GrandTesteur le 6 décembre dernier à Reims, Philippe Hénaux connaît bien le sujet de l’expérimentation territoriale. Directeur de la Mission Territoire Intelligent à la Direction Générale Adjointe Stratégie Transitions Écologiques et Numériques à l’Eurométropole de Metz, il pratique cette approche depuis plusieurs années avec un dispositif spécialement pensé et déployé sur son territoire. Il nous en parle.
Quelle est la genèse du dispositif “une startup, une expérimentation” ?
Lors de la journée GrandTesteur du 6 décembre, j’ai participé à la table ronde “Comment mener financièrement et juridiquement son projet d’expérimentation” afin de partager mon retour d’expérience sur le sujet acquise au sein de l’Eurométropole de Metz.
En 2019, j’étais impliqué dans le dispositif French Tech, et j’échangeais beaucoup avec les startups. Leur problème était de “justifier” qu’elles étaient implantées à Metz et non sur un territoire plus connu pour être porteur en matière d’innovation. Nous avons alors organisé des Trophées de l’Innovation, mais ceux-ci ne valorisaient pas l’Eurométropole. Nous avons alors décidé d’aller plus loin dans l’accompagnement des startups : au-delà de l’aspect financier, nous souhaitions leur permettre de tester et de développer leurs produits ou services. J’ai donc organisé une consultation, où l’Eurométropole de Metz était cliente d’une startup.
Nous avons ainsi monté en 2019 un dispositif, “Une startup, une expérimentation”. Celui-ci permet à un acteur économique de co-tester un produit ou un service avec une collectivité grâce à la mise à disposition d’un territoire ou d’un bâtiment. Cette logique d’expérimentation peut aboutir à différents scénarios :
● Les résultats peuvent être mitigés pour des raisons diverses. Par exemple, il peut y avoir une impossibilité de mise en œuvre car l’organisation permettant de prendre en charge le service ou le produit testé n’est pas effective, ou bien le test met en lumière le fait que le produit ou le service ne répond finalement pas au besoin, etc.
● Les objectifs peuvent être atteints à 100%. Dans ce cas, on organise la continuité et la pérennisation de l’expérimentation.
L’impact de cette démarche était très positif pour les deux parties : la collectivité s’inscrit clairement dans le sujet de l’innovation au service du territoire, et la startup gagne en chiffre d’affaires, en capacité d’évolution, et en crédibilité car elle obtient ainsi une belle référence.
Comment conciliez-vous expérimentation, territoire et exigences de la commande publique ?
Je pense qu’il est essentiel de collecter les besoins non résolus et les solutions existantes sur le territoire. L’innovation doit en effet répondre à un besoin, et c’est dans ce cadre que l’expérimentation est une approche qui peut et doit intéresser les collectivités. A l’Eurométropole de Metz, nous partons sur la logique d’un budget de 100 000€ HT / an dédié à la capacité d’expérimentation sur plusieurs services, et qui passe par la commande publique. Ces marchés font preuve d’efficacité car ils ne passent pas par des structures juridiques complexes.
Dans le cadre du dispositif “Une startup, une expérimentation”, nous pouvions par exemple passer des marchés d’expérimentation avec mise en concurrence sans publicité à hauteur de 30 000€ HT. Ce seuil est bien entendu plus élevé pour les marchés d’innovation, car il est de 100 000€ HT. Il est certain que pour certaines solutions ce seuil est bienvenu, et je pense qu’il existe plusieurs manières de faire de l’expérimentation.
Les marchés que nous passons dans le cadre du dispositif “Une startup, une expérimentation” sont co-construits afin que le niveau de succès de l’expérimentation soit objectif et que l’on puisse capitaliser sur les expériences. En outre, ils font bien sûr partie intégrante de la feuille de route Territoire Intelligent de l’Eurométropole. Cette approche nous permet de tester actuellement des solutions de déchetterie connectée, de mesure du pollen en temps réel, ainsi que la mesure de la consommation énergétique par habitant dans un bâtiment. Et d’autres expérimentations sont d’ores et déjà prévues à moyen terme, comme le comptage des vélos (pour justifier et planifier les investissements concernant les pistes cyclables), ou encore la qualité de l’air en intérieur.